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Conservatisme et révolutions scientifiques

31 Juillet 2005, 00:00am

Publié par Fabien Besnard

Conservatisme et révolution scientifique.

 

Lors de la conférence « le siècle d’Einstein », Carlo Rovelli a fait une remarque très intéressante sur les articles de 1905 du grand physicien. À cette époque trois grandes théories dominaient la physique : la mécanique, l’électromagnétisme et la thermodynamique (ou la physique statistique, si l’on préfère). Or les articles d’Einstein se situaient précisément aux trois interfaces entre ces grands domaines : électromagnétisme et mécanique (relativité restreinte), électromagnétisme et thermodynamique (effet photoélectrique), mécanique et thermodynamique (mouvement brownien).

Rovelli souligne que c’est en prenant au sérieux la physique de son temps, en étant d’une certaine manière très conservateur, qu’Einstein a été amené à des découvertes révolutionnaires. Autrement dit ce ne sont pas les hypothèses dont est parti Einstein qui étaient révolutionnaires, mais les conclusions auxquelles il est parvenu, en partant uniquement de principes physiques reconnus ou de faits expérimentaux (la constance de la vitesse de la lumière dans tous les référentiels, plus tard l’égalité de la masse grave et de la masse inertielle) promus au rang de principes.

Aujourd’hui la physique théorique est dominée par deux grands domaines : la théorie quantique des champs, et la relativité générale, et le point de vue que développe Rovelli dans son livre « Quantum Gravity » est qu’il faut prendre ces théories au sérieux, sans faire d’hypothèse fracassante. Bien sûr son idée est que la gravité quantique à boucle réussit la jonction entre la théorie quantique et la relativité générale en suivant ce chemin « conservateur ».

Il faut reconnaître que, sans faire d’hypothèse physique nouvelle, la gravité quantique à boucle parvient à des conclusions remarquables, comme la quantification de l’aire, tandis que la théorie des cordes enchaîne les hypothèses (hypothèse initiale des cordes, dimensions supplémentaires, supersymétrie, etc… )  sans parvenir à aucune véritable prédiction.

Bien sûr, in fine, l’expérience tranchera mais il me semble que Rovelli ne fait que rappeler des principes scientifiques de base, qu’on pourrait rapprocher du rasoir d’Occam, qui ont historiquement fait la preuve de leur fécondité, tandis que les belles idées, issues des plus grands esprits que la Terre ait porté, mais finalement abandonnées, se comptent par dizaines.